Adapter un livre sur grand écran est un classique au cinéma mais c’est un art qui n’est pas forcément maitrisé par tout le monde. Le plus souvent, certains se contentent de faire un copié-collé du bouquin en question (comme si on avait photographié les pages) quand d’autres vous proposent une version libre, tellement libre qu’ils dénaturent l’œuvre originale.
Il s’agit donc de trouver un compromis plus ou moins solide, plus ou moins fragile entre ces deux écueils et sur ce plan, Clovis Cornillac s’est plutôt bien débrouillé. L’acteur-réalisateur s’est en effet emparé du second opus de la trilogie de Pierre Lemaitre, Les Enfants du désastre, pour nous raconter l’histoire de Madeleine Péricourt. Nous sommes en 1929 à Paris. Madeleine Péricourt vient d’hériter de l’entreprise et de la fortune de son père. Le Tout-Paris assiste aux funérailles d’un homme particulièrement important et puissant, propulsant sa fille à la tête d’un vaste empire bancaire et financier. C’est lors de cet événement que Paul, son fils unique, va commettre un geste inattendu comme tragique et désespéré. S’il s’en sort miraculeusement, l’acte de Paul sera à l’origine de la ruine et du déclassement de Madeleine. La jeune femme devra alors se reconstruire, dans une Europe aux proies aux totalitarismes et dans une société où il ne fait pas bon d’être d’une femme de pouvoir.
Couleur de l’incendie est donc la suite directe d’Au-revoir là-haut, sorti en 2017, bien que l’histoire peut tout à fait se comprendre, même si on n’a pas eu l’occasion de lire le premier tome de Pierre Lemaitre ou vu son adaptation au cinéma, menée d’une main de maitre par Albert Dupontel. Dix ans environ après la Grande Guerre, Madeleine Péricourt se trouve à la tête d’une entreprise florissante et en bonne santé financière. La jeune femme n’est pas dupe, elle sait que ce statut, c’est le résultat du travail acharné de son père et de son sens des affaires. Toujours est-il que sa place, son nouveau rôle, suscite immanquablement des convoitises et autres comportements intéressés, voire très intéressés.
C’est notamment le cas de Gustave Joubert, le conseiller spécial d’Edmond Péricourt qui, avide de pouvoir et d’ascension sociale, se verrait bien devenir le nouvel époux de Madeleine mais pas seulement. Citons également Charles Péricourt, l’oncle de Madeleine, un député ambitieux mais facilement corruptible et corrompu, espérant que l’arrivée de sa nièce ne changera rien, en particulier pour le financement de ses campagnes politiques, sans oublier André Delcourt, le percepteur de Paul, un homme qui se rêve journaliste mais qui n’hésitera pas à se compromettre, pourvu qu’il en retire un bénéfice conséquent.
Tous trois gravitent autour de Madeleine. Trois hommes qui voudront faire payer à Madeleine sa façon de faire et une certaine indépendance. En effet, Madeleine entend faire les choses à sa façon, bien déterminée à s’affirmer et n’entend pas demeurer une potiche, encore moins une marionnette. Une attitude qui ne sera pas conséquences mais qui la rendra encore plus résilience et plus stratège même au moment où son fils commet l’irréparable.
Si la version ciné diffère du bouquin, Clovis Cornillac est cependant resté fidèle à l’œuvre originale et surtout à son esprit. Avec un bon rythme (on ne voit pas les 2h14 passer), Couleurs de l’incendie aurait très bien pu se dérouler à notre époque, tant certains sujets demeurent d’actualité, parfois de façon effarante.
Couleurs de l’incendie
Un film de : Pierre Lemaitre
Avec : Léa Drucker, Benoît Poelvoorde, Alice Isaaz, Clovis Cornillac, Olivier Gourmet, Jéremy Lopez, Alban Lenoir, Johan Heldenbergh, Fanny Ardant, Jana Bittnerova…
Pays : France
Genre : Drame, Historique
Durée : 2h14
Sortie : 9 novembre
Note : 16/20