Yalda, la nuit du pardon : justice cathodique

Ce que j’aime (particulièrement) quand je vais au cinéma, c’est de sortir des sentiers battus et de découvrir des films qui nous interrogent sur notre monde. 

C’est le cas de l’Iran et de son cinéma. Un cinéma qui n’a pas la vie facile en raison d’une Révolution islamique qui exerce encore et toujours des pressions sur celles et ceux qui posent un regard critique, voire virulent sur le régime. Certains en font même les frais à l’instar de Jafar Panahi, régulièrement harcelé. 

Nous sommes à Téhéran sur le plateau d’une émission de télévision, Le plaisir du pardon. Maryam est une jeune femme de 22 ans. Elle fut marié à Nasser, un riche publicitaire de 65 ans. Elle tombe enceinte de lui et décide de garder l’enfant malgré l’opposition de son époux. Elle le tue accidentellement mais se trouve accusée de meurtre et se retrouve condamnée à mort par la justice. Son destin semble scellé. Seule Mona, la fille de Nasser, peut la sauver de la pendaison, si elle renonce à la loi du Talion. Pour cela, Maryam doit demander pardon à cette dernière, en direct, devant des millions de téléspectateurs. S’en suit alors, une longue soirée durant laquelle une réponse à simple requête peut tout faire basculer, d’un sens comme dans l’autre.

Certains d’entre eux se diront qu’il s’agit d’une histoire à dormir debout tellement qu’elle est invraisemblable. Pourtant, il s’agit bel et bien d’une fiction inspirée de faits réels. Autrement dit, ce genre d’émission existe en Iran où une personne qui s’estime offensée peut décider d’un oui ou d’un non du sort d’un condamné. 

Maryam se trouve en effet dans une position très inconfortable. Elle va être probablement pendue pour avoir tué son mari. Cette jeune femme ne sait pas trop ce qu’il lui arrive et surtout ce qu’elle fait là. Jusqu’ici, elle nouait une relation de confiance avec sa belle-famille et voyait en Nora une sœur. Elle qui est traitée comme une vulgaire criminelle, doit se défendre et expliquer son geste présumé. Elle veut réclamer le pardon non pas uniquement pour sauver sa tête, mais aussi sa dignité. 

De l’autre, Nora est dans une position tout aussi inconfortable. Elle veut justice et la loi du Talion (garantie par la Charia, la loi islamique), le lui permet. Si elle décide ne pas pardonner (donc gracier d’une certaine façon), Nora, personne ne lui en tiendra rigueur. Cependant, est-ce bien facile d’assumer une telle décision devant des téléspectateurs qui assistent à ce qu’il convient de considérer comme une dramaturgie ? Car de sa réponse dépend la vie de Nora. 

Dans un décor et une ambiance assez anxiogène, Yalda, la nuit du pardon porte un regard assez critique sur les média et leur pression en terme d’audimat bien sûr mais aussi sur deux femmes qui n’ont pas le contrôle de la situation. Elles subissent une dictature, insidieuse celle-ci dans laquelle, le destin d’une vie peut être réglé d’un simple SMS. Malgré un rythme un peu lent, Yalda, la nuit du pardon n’est pas avare en rebondissements, ce qui maintient un certain suspense et donne un point de vue glaçant sur la société iranienne. 

Yalda, la nuit du pardon (Yalda)

Un film de : Massoud Bakhshi

Avec : Sadaf Asgari, Behnaz Jafari, Babak Karimi, Fereshteh Sadre Orafaee, Forough Ghajebeglou…

Pays : Iran

Genre : Thriller, Drame

Durée : 1h29

Sortie : le 7 octobre

Note : 15/20  

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