
Cette semaine, Wonder Woman 84 devait (enfin) sortir en salles, après de multiples reports. Initialement prévu pour le 1erjuin, puis au 12 août, les spectateurs et autres cinéphiles que nous sommes devaient (enfin) découvrir la suite des aventures de Diana Price dans l’Amérique des années 1980 et son face-à-face avec son ennemie jurée, Cheetah. Il faudra attendre une fois encore l’affrontement tant attendu. Il y a quelques semaines en effet, DC Comics et la Warner ont reprogrammé WW84 pour le 30 décembre prochain, un peu dans l’indifférence générale.
Ce satané COVID n’en finit pas de pourrir le calendrier des sorties tant attendues pour cette année au point que nous nous sommes d’une certaine manière habitués. Habitués à l’idée de passer une année sans blockbusters ou presque, la plupart de films attendus n’en finissant pas d’être reprogrammées le plus loin possible, voire au-delà de 2020. Dernière info en date, West Side Story de Steven Spielberg qui devait sortir pour décembre sera finalement en salles un an plus tard, tout comme Top Gun Mavericks laissant de sérieux doutes quant à la présence de Dune, le dernier long-métrage du Canadien Denis Villeneuve à la fin de l’année, en dépit d’une bonne annonce prometteuse.
Il faut dire que le contexte n’y prête pas vraiment d’autant qu’il est encore anxiogène, notamment en Amérique du nord où la COVID19 continue de faire des ravages et perturbe grandement l’économie américaine malgré quelques signes de reprise ci et là. Les salles de cinéma ne sont pas ouvertes partout et pire, certaines d’entre elles ferment de nouveau, notamment au Canada où au Québec, certaines métropoles ou agglomérations (comme Montréal par exemple) sont passés en zone d’alerte, face à la recrudescence des cas de contaminations et afin de faire face à une seconde vague qui se précise de plus en plus, voire déjà là. Aux Etats-Unis, la crise est telle que l’industrie cinématographique en appelle désormais au Congrès face à l’urgence.

Cette situation inédite profite mécaniquement aux plate-forme de SVÀD où certaines productions ne se prennent même plus à la tête et décident au bout du compte de sortir leur film directement en ligne, une façon pour ces dernières de limiter la casse mais aussi une éventuelle contre-performance en salles. Je pense notamment à Forte avec Melhia Bedia et Valérie Lemercier présent sur Amazone Prime depuis mi-avril dernier mais aussi à Brutus vs. César. Initialement destiné pour le grande écran également au printemps dernier, le nouveau film de Kheiron a lui aussi opté pour une présence en ligne, ce qui n’a pas empêché un flot négatif (pour ne pas dire acerbe de critiques)
Cette succession de reports interroge dans la mesure où une fois encore, le marché nord-américain reste la référence, celui qui donne le « la » au reste du monde en matière de fréquentation et de box-office, ce qui se vérifie pour les blockbusters, ces films qui font que les gens iront (ou non) se déplacer au cinéma. Pour celles et ceux qui s’en douteraient encore, le cinéma est certes un art, mais aussi un (lieu de) divertissement dont l’objectif est de faire tourner la planche à billets. Vu le contexte ambiant et les sommes engagées, les grands studios hollywoodiens n’ont pas d’autre choix que de jouer la carte de la prudence et du report, quitte à créer encore plus de frustration.

Une stratégie assez risquée, surtout quand on voit la poussée et la bonne santé des plateforme de SVÀD mais également l’attitude d’un géant comme Disney qui n’a pas hésité à mettre en ligne la version live de Mulan, un film pensé pour le grand écran et dont certains craignent que cela crée un précédent, pouvant à terme constituer une menace pour les salles de cinéma et autres multiplexes. Une stratégie toutefois potentiellement payante à terme dans la mesure où la frustration peut aussi provoquer de l’impatience et du désir, d’autant que, par effet de ricochet, l’année 2021 devrait être fournie de blockbusters à foison et de films particulièrement attendus.