Démission collective

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Alain Terzian, Président (démissionnaire) de l’Académie des César, le 29 janvier dernier

C’est une révolution de palais aussi silencieuse qu’inattendue qui s’est produite, il y a quelques jours. Alain Terzian, le président de l’Académie des César a donné sa démission ainsi que l’ensemble du conseil d’administration.

Ce geste fait suite à la publication d’une tribune dans Le Monde qui dénonce le fonctionnement de l’institution mais aussi son manque d’ouverture comme de diversité, dans un contexte marqué par l’affaire Polanski, et sa nomination très contestée à douze prix dont celui du meilleur film pour J’accuse.

Cette démission collective fait l’effet d’une bombe à moins de deux semaines de la 45ème cérémonie des César qui se tiendra le 28 février. En effet, Alain Terzian semblait diriger l’Académie d’une main de fer depuis près de deux décennies, sans la moindre contestation apparente. Cependant, la récente tribune du Monde (mais aussi l’affaire Polanski pour laquelle il a été reproché à Alain Terzian un manque de réaction) semble avoir mis un point final à cette toute-puissance apparente mais aussi mis en lumière un conflit de générations au sein de la grande famille du cinéma français.

Puissant homme de l’ombre et fin négociateur, Alain Terzian est l’homme qui a permis de relancer les César, une Académie à la dérive aux débuts des années 2000 sous la gestion de Daniel Toscan du Plantier. Pour cela, l’ancien journaliste et producteur (il a notamment et largement contribué au succès des Visiteurs en 1993) n’a pas lésiné sur le lobbying et les partenariats notamment avec la BNP Paribas mais aussi et surtout Canal Plus. Une stratégie qui s’est avérée payante et lui a permis d’installer son influence sur l’institution. Un tel statut qui ne lui a cependant pas permis de se renouveler et encore moins de prendre en compte les évolutions de son époque.

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Outre le manque criant de transparence, les signataires de la tribune – parmi lesquels, Mathieu Almaric, Omar Sy, Robin Campillo, Marina Foïs, Michel Hazanavicius ou encore Bérénice Bejo – déplorent un fonctionnement et une vision autoritaire, voire autocratique, mais aussi son absence totale de renouvellement. Pour info, sur les près de 4600 membres de l’Académie, seulement 35% d’entre eux sont des femmes, le 2/3 restant étant des hommes, majoritairement âgés et blancs. C’est – certes – « mieux » qu’aux Oscars mais suffisant pour qu’une génération plus récente du cinéma français finisse par sortir de sa réserve. En outre, l’Académie souffre d’une certaine ouverture à l’encontre de cinéastes moins « conventionnels » qui sont purement et simplement écartés, notamment Virginie Despantes et Claire Denis qui ont été recalées, en tant que marraine, à la soirée des jeunes espoirs, sur décision autocratique d’Alain Terzian.

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Alain Terzian avec Scarlett Johansson, Romain Duriac et Quentin Tarantino, lors de la 39ème cérémonie des César en 2014

Il est vrai que malgré quelques innovations et efforts, les César souffrent d’une image défraîchie et la soirée des récompenses en est, parfois, le titre exemple. Il suffit de voir le déroulement de la cérémonie qui, certes, n’est pas ennuyeuse en soi, mais dans laquelle on tourne assez vite en rond. Un manque d’ouverture qui se retrouve également avec certains genres qui restent encore et toujours sur la touche, en particulier la comédie. Nombre de réalisateurs et acteurs pestent contre le fait que les films comiques sont les grands absents des César, comme si ces longs-métrages ne méritaient pas leur place, dans une Académie qui veut rassembler la crème de la crème du cinéma français. Si, pour contourner la polémique, l’institution a créé le César du Public – permettant à Raid Dingue de DanyBoon en 2018, puis aux Tuche 3 d’Olivier Baroux en 2019 de remporter le prix – cela n’a cependant pas permis de résoudre la controverse, bien au contraire !

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Alain Terzian, en 2014

La démission d’Alain Terzian peut être source d’opportunités pour réinventer l’Académie et permettre à l’institution de s’ouvrir davantage, dans tous les sens du terme, c’est du moins ce qu’espèrent ardemment certains, notamment les signataires de la tribune du Monde. Un pari un peu risqué mais qui en vaut la peine, si on veut éviter que les César soient menacés de ringardisme, à l’avenir !

Un avis sur “Démission collective

  1. Il suffit de regarder ceux qui ont gagné l’an passé pour voir que l’Académie est ouverte, notamment aux jeunes, c’est un premier film qui avait gagné l’an passé ! Je vote aux César et j’y ai travaillé quelques années, il y a beaucoup de choses que je pourrais contester dans votre article, mais cela serait trop long…. Tout est amalgame de nos jours, on mélange tout et on confronte tout…. Pour ma part, je vote pour le film qui m’a le plus marqué, qu’il soit d’un jeune, d’un vieux, d’une femme ou d’un homme. Le cinéma comme tout, est aujourd’hui politique et beaucoup trop à mon goût

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