La liberté se joue à pas grand-chose et c’est souvent lorsqu’on rogne dessus ou qu’on la perd, qu’on se rend compte de sa valeur.
Nous sommes en Algérie, dans les années 1990. Nedjma a dix-huit ans et elle est étudiante en licence de français. Elle vit dans le bâtiment des filles de la Cité Universitaire et rêve de devenir styliste. Le soir, elle se faufile avec sa meilleure amie dans les soirées d’Alger où elle vend ses créations aux papichas, de jolies filles de la capitale. Le contexte politique et social ne cesse pourtant de se tendre. Les fondamentalistes musulmans se font entendre et tentent d’imposer leur idéologie dans la société. Nedjma et ses amies refusent cette fatalité d’autant qu’un évènement tragique bouleverse la vie de la jeune femme. Déterminée à ne pas se laisser faire et à affirmer sa liberté, elle décide de réaliser un défilé de mode.
Il n’est pas souvent évident de parler de sujets sensibles surtout lorsque l’action se passe dans ce qu’on appelle le monde arabe. Papicha – comme Much Loved en son temps – fait partie de cette catégorie. Le film de Mounia Meddour revient sur un épisode encore vif de la jeune histoire algérienne, celle de la guerre civile qui voit la montée de l’islamisme et le durcissement du régime. Dans les rues d’Alger, les fondamentalistes tentent d’imposer leur loi et ce sont les jeunes femmes qui en sont les premières victimes. Selon eux, une femme de bonne condition ne doit pas faire des choses contraires à la morale, ce qui laisse un spectre assez large. En effet, ils exècrent tout ce qui peut être assimilé au savoir, à l’éducation et à l’émancipation. La jeune algérienne ne doit pas « provocante » et soumise en toute circonstance.
Cette situation Nedjma ne peut la supporter et encore moins la cautionner. La jeune femme, belle et rebelle, se bat à sa façon contre cet intégrisme. Son arme ? Son crayon et ses feuilles de papier. Le combat peut sembler inégal mais elle ne veut pas céder, ce qui veut dire aussi rester en Algérie. A l’heure où ses amies rêvent de Canada ou de France, Nedjma refuse catégoriquement de partir. Elle veut vivre normalement, aimer normalement, quitte à braver tous les interdits.
Film percutant, Papicha décrit le combat contre le conservatisme et l’obscurantisme dans une Algérie des années 1990 qui se déchire. Remarqué au dernier Festival de Cannes, sélectionné dans la catégorie du Meilleur film étranger aux prochains Oscars, le long-métrage de Mounia Meddour n’est cependant pas sorti dans son pays d’origine. Espérons que le public algérien le découvre enfin, d’autant que l’occasion est plus que propice !
Papicha
Un film de : Mounia Meddour
Pays : Algérie
Avec : Lyna Khoudri, Shirine Boutella, Amira Hilda Douaouda, Zahra Doumandji, Yasin Houicha…
Genre : Drame
Durée : 1h49
Sortie : le 9 octobre
Note : 16/20
Un avis sur “Papicha : « Défilé, j’écris ton nom ! »”