
Cela fait deux jours qu’on a enroulé le tapis rouge à Cannes et que les derniers festivaliers ont quitté la Croisette pour de nouvelles aventures en attendant l’année prochaine.
Si la 72ème édition du Festival a réservé son lot de strass, de paillettes ou bien encore de glamour, la polémique et le scandale n’ont pas été oubliés. Cette année, le scandale est venu d’un cinéaste aussi apprécié que détesté, Abdellatif Kechiche, venu présenter le second volet de sa trilogie Mektoub my love.
Sélectionné par la direction du Festival au dernier moment, Mektoub my love : Intermezzo est la suite directe de Canto Uno, sorti il y a un peu plus d’un an dans lequel on retrouve des jeunes adultes qui découvrent le désir et le sentiment amoureux. Autant dire que le second volet pour un résultat plus que mitigé. En effet, si certains festivaliers ont crié au génie et salué l’audace de Kechiche, d’autres ont exprimé leur dégoût face à ce qui ressemblait à un film sexiste, misogyne, vulgaire, voire carrément pornographique, certains ayant même quitté la salle en cours de projection. Les avis étaient tranchés d’un côté comme l’autre à l’instar de Sens Critique qui a carrément dézingué le long-métrage et, au passage, rhabillé le réalisateur franco-tunisien pour l’hiver, comme l’indique sa critique vidéo ci-dessous.
Le second volet est – semble-t-il – d’un autre niveau et les détracteurs d’Intermezzo conspuent un scénario superbement vide et sans intérêt, une durée trop longue (3h28) et des dialogues plats, pour ne pas dire très plats. Mais ce n’est rien comparé à une scène qui a elle-seule constitue l’objet du scandale, celle où l’actrice principale Ophélie Bau, se fait « embrasser » (notez l’euphémisme) les lèvres (inférieures) dans les toilettes durant treize longues minutes. Une situation qui a mis bien des gens mal à l’aise, suffisamment en tout cas pour qu’on ne parle que cela et qu’on dézingue encore un peu plus Kechiche au passage.
« La vulgarité, le sexisme et la saleté n’ont rien à faire à Cannes. Avoir vendu sa Palme d’Or pour financer cette suite était une bien belle erreur Monsieur Kechiche. »@Tom__Vannier s’attaque avec hargne à Kechiche et son #MektoubMyLoveIntermezzohttps://t.co/52KwEShkwB
— CinéVerse (@CineverseOff) May 27, 2019
Ce n’est pas la première fois que Kechiche provoque une telle polarisation. En 2013 déjà, La Vie d’Adèle avaient soulevé de vives critiques en raison de certaines scènes explicites décrivant l’amour lesbien et l’émancipation d’une jeune femme. Les critiques acerbes n’avaient pas empêché le film de décrocher la Palme d’Or, faisant au passage taire ces dernières. Six ans après, le second volet de Mektoub my love, ou plutôt son réalisateur, a aussi droit à son lot de critiques assassines comme louangeuses, avec le renforcement des pros d’un côté et des antis Kechiche de l’autre, les seconds dénonçant au passage, l’attitude plus que limite du cinéaste envers ses acteurs notamment lorsqu’il s’agit de tourner des scènes explicites.
Ce qui est assez cocasse pour un film que peu de personnes ont vu jusqu’ici et dont on ne sait pas encore sa date de sortie comme le souligne assez justement Première, d’autant que le film est en work in progress, comprendre qu’il sortira dans un format différent de celui montré à Cannes. Une nouvelle fois, Kechiche divise, est adulé par certains, conspué par d’autres, ce qui lui fait une sacrée pub, in fine.
Car c’est bel et bien le réalisateur franco-tunisien qui sort gagnant d’une polémique qu’il n’a pas provoqué, encore moins alimenté. Il le sait, on parle de son film en (très) négatif et (peu) en positif, mais qu’importe ! Mektoub my love : Intermezzo suscite interrogations, spéculations et fantasmes, réussissant même l’exploit selon Première de faire passer Gaspar Noé pour un gentil (du moins son dernier Climax), ce qui me semble un tantinet exagéré quand on connait le cinéma très spécial de ce réalisateur.

En attendant, on a parlé du film de Kéchiche (même l’ancienne actrice X, Ovidie, s’en est mêlée, c’est dire !) sans que personne (ou presque) ne l’ait vue. Une promo gratuite en somme.