J’ai souvent tendance à penser que l’Histoire se répète (c’est sans doute mon passé d’étudiant qui me pousse à écrire cela ! 😉 ) J’ai aussi tendance à croire que si on nie son passé ou qu’on ne l’assume pas, on est condamné à le revivre. Alors on ne peut qu’être troublé lorsqu’on sort de la projection du nouveau film de Kathryn Bigelow qui revient sur une période noire et peu glorieuse des Etats-Unis contemporains. Un épisode qui fait écho à l’actualité immédiate et des dernières semaines.
Nous sommes à l’été 1967 à Détroit, capitale de l’Etat du Michigan et la ville est à ébullition. Depuis quelques jours, les Afro-américains affrontent les forces de l’ordre pour protester contre les violences policières, la ségrégation et la Guerre du Vietnam. Très vite, des émeutes éclatent et embrasent la cité. Lors du troisième jour des révoltes, la Police locale, vite rejointe par la Police d’Etat et la Garde nationale encerclent un motel où semblent être partis des coups de feu. Dans ce lieu se sont réfugiés un groupe de musiciens – The Dramatics – ainsi que d’autres jeunes noirs, mais également deux jeunes femmes blanches. S’estimant visée, la Police de Détroit mènera un interrogatoire musclé et sadique au mépris des règles de procédure. Le tout sous l’œil de Melvin Dismukes, un agent de sécurité noir qui tente de survivre à ce chaos tout en protégeant ses semblables.
Comme je vous l’indiquais, Detroit évoque un épisode sombre de l’Histoire des Etats-Unis qui leur colle toujours à la peau aujourd’hui. L’ambiance anxiogène du film (qui intègre de nombreuses vidéos d’archives) ainsi que le rythme un peu « stop and go » c’est-à-dire ici, rapide et mais aussi très lent. C’est sans doute fait exprès pour souligner la terreur qui habite ces jeunes qui étaient venus se réfugier dans au motel Algiers, le temps que la situation se clame et qui se retrouve sous l’emprise de policiers foncièrement racistes, remplis de haine contre les Noirs bien décidés à casser du Nègre – si j’ose dire ! – et qui traitent de trainée deux jeunes femmes blanches car les soupçonnant de préférer coucher avec des Noirs ! Inutile de vous dire que le bilan sera particulièrement lourd, aussi bien sur le plan humain mais aussi psychologique. L’épisode de l’Algiers marquera plusieurs protagonistes à commencer par le leader des Dramatics, un musicien mais surtout un chanteur plein d’avenir qui rêve de signer à la Motown, l’emblématique label de la fin des années 1960.
Si Kathyrn Bigelow ne pouvait se douter que son film sortirait au moment des évènements de Charlottesville l’été dernier, Detroit fait furieusement écho à l’actualité immédiate des Etats-Unis. Ce pays a clairement un problème avec son passé et le vivre-ensemble et n’a pas attendu Donald Trump pour faire émerger ses vieux démons. Detroit montre surtout qu’au-delà du devoir de mémoire, c’est également toute une philosophie qu’il convient de combattre dans le pays de l’Oncle Sam. Car si le temps passe, les blessures restent vives. Même un demi-siècle après !
Malgré une fin assez prévisible (mais somme toute logique), Detroit n’en demeure pas moins un film coup de poing. Suffisant pour que les consciences évoluent ? Je ne sais pas ! Mais essentiel pour ne pas oublier et ne rien laisser passer, ni hier, ni aujourd’hui, ni demain. Oui, l’Histoire est en un éternel recommencement.
Detroit
Un film de : Kathryn Bigelow
Pays : Etats-Unis
Avec : John Boyega, Will Poulter, Algee Smith, Jacob Latimore, Jason Mitchell, Hannah Murray…
Genre : Thriller, Drame
Durée : 2h23
Sortie : le 11 octobre
Note : 17/20