Ambiance bizarre dimanche dernier. En plus du temps maussade et de la nuit qui tombe dès 17 heures, sans oublier la pluie, des vigiles sont désormais postés à l’entrée du cinéma UGC de la Porte d’Aubervilliers. Pour quiconque veut se faire une toile, il devra désormais montrer patte blanche. Contrôle des sacs, et sourire de rigueur, les entrées sont filtrées et certaines condamnées.
Même ambiance aux Halles, en bien pire. Le cinéma ouvre timidement, l’accès bas est condamné pour une durée indéterminée. Pour accéder aux salles désormais, il faut monter à l’étage. Pareil, les agents de sécurité filtrent les entrées et fouillent les sacs et demandent même qu’on ouvre les manteaux. Triste contexte !
Les terribles et odieux attentats qu’on a connu ces derniers temps à Paris ont vu d’importances conséquences pour les cinémas. Le lendemain de l’attaque du Bataclan, du Stade de France, et des terrasses parisiennes concernées, la plupart des distributeurs a annoncé la fermeture de leurs complexes à Paris intramuros et dans toute l’Ile de France. Décision terrible mais finalement logique, par respect aux familles de victimes mais aussi en raison de l’atmosphère pesante. Ce qui s’en ressent sur la fréquentation des salles qui, si elle reprend progressivement, n’est pas au niveau d’avant les attentats. Pas besoin de chiffres pour étayer mes propos, il suffit de se rendre aux Halles, d’habitude bien garni le soir pour s’en rendre compte.
Conséquence directe, les salles sont plus clairsemées que d’habitude et certains films et avant-premières en font les frais, malgré eux. Lundi dernier, par exemple, j’avais assisté à l’avant-première exceptionnelle de Steve Jobs, le nouveau film de Danny Boyle qui ne sortira qu’en France, le 3 février prochain. Les billets s’étaient arrachés en quelques jours mais les attentats sont passés par là et ont laissé la salle 10 (la plus grande de l’UGC des Halles) remplie aux ¾.

Suite aux évènements de vendredi, certains distributeurs ont préféré annuler d’autres avant-premières, voire reporter certains films à une date ultérieure, notamment Made in France qui devait sortir ce mercredi. Il faut dire que le contexte ne prête vraiment pas, le film retraçant l’histoire d’un journaliste français de confession musulmane qui s’infiltre dans une cellule terroriste qui projette de faire un attentat de grande ampleur sur Paris. Un mauvais timing pour un film dont j’ai eu l’occasion de voir en avant-première fin octobre, victime d’un mauvais coup du sort. Bien que sa sortie aurait pu être plus que salutaire, la décision de le reporter ne pouvait qu’être logique.
Dans un contexte post-attentat, il en faut beaucoup pour retourner au cinéma, surtout si on n’est pas cinéphile comme moi. Pas si simple de se changer les idées où la sécurité semble s’installer tranquillement dans nos vies quotidiennes alors que lorsqu’on va au cinéma, c’est normalement pour un temps de convivialité et de plaisir. Qui plus est, si c’est pour y aller, autant choisir des comédies et films un peu léger, n’évoquant peu ou prou la violence.
Résultat des courses, certains films comme Les Anarchistes souffrent niveau entrées là où d’autres comme l’attendu Jane Got a Gun, le premier film indépendant de Natalie Portman en tant que réalisatrice, est tout simplement reporté. Même le quatrième et dernier volet de la saga Hunger Games est en souffrance, réalisant le pire démarrage de la franchise sur l’Hexagone. Pour avoir moi-même vu le dernier film de Jennifer Lawrence, certaines scènes font immanquablement penser à des scènes de guerre ou de fusillade, ce qui dans le contexte actuel est quelque peu problématique. En revanche, certains ont le choix de maintenir la sortie de certains films considérant que renoncer, cela viendrait à céder. C’est ainsi que l’on devrait voir Les Cowboys avec François Damiens la semaine prochaine et Taj Mahal, le 2 décembre prochain qui raconte la prise d’otage terroriste de l’hôtel Méridien de Bombay en 2008, à travers le personnage principal.
Et pourtant, le cinéma est un lieu non seulement pour se divertir, mais aussi un lieu de résistance car ouvert sur le monde, poussant chacun à s’interroger sur le monde qui nous entoure et dont on n’arrive pas toujours à comprendre. C’est parce que certaines crapules déversé leur haine de cette ouverture sur le monde, préférant l’obscurantisme, que le cinéphile que je suis se doit de continuer d’aller au cinéma, comme cela fut le cas en début d’année, le soir-même des attentats contre la rédaction de Charlie Hebdo. Bien sur il y a toujours cette appréhension de se dire que des fous peuvent s’introduire subitement en pleine projection et canarder tout le monde. Mais dans ce cas, autant ne rien faire et se dire que ces dingues ont gagné ! Et comme j’aime plutôt leur donner tort…
Donc, à la question « Faut-il vraiment aller au cinéma ces temps-ci ? », pas la peine de vous donner ma réponse ! 😉